Diplomatie culturelle, scientifique et technique : des archives essentielles à explorer

Diverses et variées, souvent méconnues, les archives culturelles du ministère des Affaires étrangères donnent un éclairage sur la politique culturelle française à l’étranger, les moyens déployés pour asseoir et maintenir son influence dans le monde. Ces archives, dont les dates s’échelonnent de 1910 à nos jours, émanent de la direction culturelle et de son réseau.


La diplomatie culturelle est née en France de la volonté de consolider et de préserver ses zones d’influence et son empire. La création en 1959 d’un ministère des Affaires culturelles lance un mouvement qui sera suivi par différents pays. Ce nouveau ministère officiellement nommé ministère de la Culture et de la Communication réunit des services rattachés jusqu'alors aux ministères de l'Éducation nationale (direction générale des Arts et Lettres, direction de l'Architecture, direction des Archives de France) et de l'Industrie et du Commerce (Centre national de la cinématographie), et au Haut-Commissariat à la Jeunesse et aux Sports.


La politique culturelle à cette période coïncide avec un désir de démocratisation de la culture. Par décret n°59-889 du 24 juillet 1959, les missions de ce nouveau ministère sont « de rendre accessibles les œuvres capitales de l’humanité, et d’abord de la France, au plus grand nombre possible de Français ; d'assurer la plus vaste audience à notre patrimoine culturel et de favoriser la création de l'art et de l'esprit qui l’enrichisse ».


Le ministère des Affaires étrangères conserve cependant son monopole sur l’action culturelle extérieure. Ces missions traditionnelles de coopération culturelle se diversifient au cours des années pour s’adapter aux évolutions et aux contingences d’un monde en plein bouleversement.

Inauguration de l'exposition « Toutankhamon et son temps » au Petit Palais par André Malraux, Charles de Gaulle et Yvonne de Gaulle (Paris, février 1967). FR MAE, Collection iconographique, DCI, Politique intérieure, A110035

Institutionnalisation de la coopération culturelle

C’est après la Première Guerre mondiale que la coopération culturelle extérieure s’institutionnalise, se professionnalise et se déploie. Ainsi du service des Écoles françaises à l’étranger (1909-1920) qui ne compte qu’un seul agent et est en charge des écoles et des œuvres à l’étranger et de la gestion des enseignants nait un service des Œuvres françaises à l’étranger (1920-1945) plus important et rattaché à la direction des Affaires politiques du ministère des Relations extérieures. Ses missions s’élargissent à la coopération artistique et littéraire, intégrée en 1932. En 1945, le Ministère se dote d’une direction autonome des Relations culturelles et œuvres françaises à l’étranger (1945-1956), ses effectifs passent à une quarantaine d’agents et sa dotation budgétaire d’un milliard 222 millions de francs en 1945 passe en 1954 à 3 milliards d’anciens francs et ses effectifs à 75 personnes.


L’action linguistique et éducative française vise à implanter la langue et l’enseignement français dans le monde tout d’abord par le maintien et le développement des institutions existantes mais aussi par la conclusion de conventions et d’accords qui mettent en place une politique d’échanges, d’aides, sous forme de subventions et de dons de matériel et de livres, données à des écoles nationales des différents pays où la France a déployé son réseau culturel. La France contribue à l’envoi de professeurs de français et facilite les échanges universitaires ; elle octroie des bourses d’études permettant à des étudiants de venir étudier en France. En 1945, la Commission des fouilles et missions archéologiques est créée et rattachée au service de l’Enseignement de la nouvelle direction qui se dote ainsi d’une nouvelle mission patrimoniale et culturelle. Les archives culturelles conservent les rapports de cette commission sur les missions archéologiques françaises à l’étranger de 1945 à nos jours.


Les années de l’après-guerre peuvent être considérées comme le moment clef de la structuration et l’âge d’or de la coopération culturelle. Les grands historiens et littérateurs de la seconde partie du XXe siècle ont contribué à la présence française dans le monde, pour exemple, Romain Gary, Jean Marie Le Clézio, Fernand Braudel ou encore Georges Duby. Ces hommes ont enseigné le français et ou donné des conférences à l’étranger dans le cadre de la coopération culturelle menée par le ministère des Affaires étrangères.

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  • Lettre dactylographiée

    Lettre de Romain Gary du 24 novembre 1965 au sujet de conférences à donner en Europe de l'Est

    FR MAE, 307QO/416

Naissance de la diplomatie culturelle, construction d'un réseau


Par l’intermédiaire de son réseau culturel (centres, instituts, lycées français à l'étranger, réseau des Alliances françaises) - véritables organes de promotion de la culture française et de l’enseignement du français - on assiste à la naissance de la notion moderne de « diplomatie culturelle ».


La France possède deux sortes de réseau culturel, l’un institutionnel, les centres et instituts dépendant du ministère et l’autre de nature associative.

Services de coopération et d’action culturelle auprès des ambassades

Placés directement sous l’autorité de l’ambassadeur, ils assurent le pilotage et la coordination de l'ensemble des services et établissements culturels, ils mettent en œuvre la politique culturelle définie par le ministre des Affaires étrangères et répartissent les moyens nécessaires à la conduite de leurs actions respectives. Ce sont les conseillers culturels nommés dans les ambassades dès 1949, fonction assurée auparavant par les directeurs d’institut, qui sont responsables de l’application de cette politique. Les instituts sont souvent dirigés par des universitaires. En 2024, au nombre de cent-cinquante-quatre services de coopération et d’action culturelle, ce « réseau a développé son champ d’action pour répondre à de nouveaux impératifs, tels que le débat d’idées, la promotion des études en France, les migrations internationales ou le numérique. Il intègre aussi de nouvelles missions liées à l’élargissement du périmètre d’intervention du Ministère : promotion du tourisme, attractivité des territoires, etc. Il a su se réorganiser au profit de zones jugées prioritaires (pays émergents, Sahel, pays en crise) et travailler avec de nouveaux acteurs : la société civile et les collectivités territoriales ».

Instituts et centres culturels

C’est entre les deux guerres mondiales que la France s’est dotée d’un réseau d’influence étendu à l’étranger. Ces structures se développent progressivement comme des organes de propagation de la culture et de la langue française, tout d'abord sous forme d’antennes ouvertes à l’étranger par les universités françaises. Leur première mission est celle de l’enseignement du français. La seconde mission des instituts et centres culturels est la diffusion et la programmation culturelle par le biais de conférences et de cours de littérature et de civilisation française mais aussi d’organisations de manifestations culturelles (expositions, tournée de concert et de théâtre, projections cinématographiques, etc.). Enfin, ils ont la mission de fournir de la documentation et des informations sur la France. C’est ainsi que l'Institut de Florence fut créé en 1908, l'Institut de Londres en 1910, de Lisbonne en 1928 ou celui de Stockholm en 1937.

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  • Lettre dactylographiée

    Lettre de Henri Matisse du 14 novembre 1950 relative à un projet d'exposition en Allemagne

    FR MAE, 554INVA/1082

Instituts de recherche (IFRE)

Établissements scientifiques placés sous double tutelle du ministère de l'Europe et des Affaires étrangères (MEAE) et du Centre national de la recherche scientifique (CNRS), plus particulièrement consacrés aux recherches archéologiques et historiques, ils voient le jour après-guerre. Ces centres se sont spécialisés dans les sciences sociales et humaines permettant de mieux comprendre les évolutions des sociétés contemporaines en mutation. Le ministère des Affaires étrangères anime et assure la tutelle d’un réseau de vingt-sept centres et instituts de recherche en sciences sociales, humaines et archéologie à l’étranger. Ce réseau s’est mis en place et structuré grâce à la politique de présence du ministère des Affaires étrangères dès le début du XXe siècle. Pour exemple, l’Institut français d’études arabes de Damas (IFEAD) est ouvert en 1922 avec pour vocation première l’étude et la sauvegarde du patrimoine archéologique, architectural, artistique musulman au Proche-Orient ; l’Institut français d’archéologie du Proche-Orient, quant à lui, fut créé en 1946 à Beyrouth ; l’Institut français de Pondichéry fut inauguré le 20 mars 1955 à la faveur du traité de cession des établissements français en Inde, la Maison française d'Oxford en 1946, la Maison franco-japonaise (MFJ) est née en 1924 de la volonté de Paul Claudel, ambassadeur au Japon à cette date. Ces établissements sont dotés d’une autonomie financière.

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  • Lettre manuscrite

    Lettre de Henri Seyrig du 20 mai 1930 au sujet de fouilles archéologiques en Syrie

    417QO/227

Alliances françaises

L’Alliance française voit le jour en 1883 à l’initiative de Paul Cambon, chef de cabinet de Jules Ferry avec pour objectif de faire rayonner la culture française à l'extérieur de la France après la défaite de 1870 en rétablissant un « soft power » face à l’Allemagne et en promouvant la philosophie des Lumières dans l’empire colonial naissant. Le statut de l'Alliance est apolitique et laïque. Les Alliances françaises qui s’implantent dans différents pays sont des associations à but non lucratif nées d’initiatives locales. Elles sont liées à l'Alliance française de Paris par la signature de conventions qui leur octroie le label « Alliance française ». La première Alliance française voit le jour à Barcelone. En 2023, le réseau des Alliances françaises est présent dans cent-trente-deux pays ; trente-cinq d’entre elles se trouvent au Brésil. Depuis 2001, le ministère des Affaires étrangères a mis en place des conventions de coopération entre les Alliances et les services de coopération et d’action culturelle par lesquelles il leur délègue la gestion de la coopération culturelle. Des crédits et la mise à disposition de personnels français détachés sont alors octroyés.

Écoles françaises et établissements religieux enseignant le français

La France compte un important réseau d’établissements d’enseignement à l'étranger qui délivrent un enseignement en français. Des écoles privées sous l’égide d’opérateurs privés associatifs comme la Mission laïque française (fondée en 1902) ou l'Alliance israélite universelle (fondée en 1860) travaillent de concert avec le réseau institutionnel du Quai d’Orsay. De 1870 à 1914, le Ministère subventionne les initiatives privées dans les secteurs éducatifs, universitaires, sanitaires, archéologiques et techniques. Les documents budgétaires ministériels font apparaitre quatre sources de financement. Deux émanent du ministère des Affaires étrangères : les crédits aux œuvres proprement dits, ainsi que les fonds secrets. Une autre source, plus inattendue, est celle des recettes du Pari Mutuel gérées par le ministère de l’Intérieur, qui serviront pour partie à notre expansion culturelle et linguistique à l’étranger : en 1909, 150 000 francs furent prélevés sur ce budget pour construire l’Institut français de Madrid. S’y ajoutent les crédits du ministère des Colonies qui serviront souvent de base arrière à notre expansion culturelle.


L’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE), établissement public chargé du suivi des établissements d’enseignement français à l’étranger, voit le jour en 1990 et prend en charge la gestion des établissements français à l’étranger et de l’animation du réseau scolaire. Couvrant la période 1937-1969, deux fonds d'archives (238QO et 239QO) retracent l’engagement du Ministère dans la défense de la langue française et l’enseignement français à l’étranger.

Opérateurs culturels

De nombreuses associations appuient la politique engagée par le Ministère.


Créée en 1922, l’Association française d’action artistique (AFAA) est l’opérateur historique de la direction générale des Relations culturelles. Ses missions sont de mettre en œuvre la politique culturelle du ministère des Affaires étrangères et la politique internationale du ministère de la Culture. Le service des Œuvres et l’Association française d’action artistique (AFAA) étaient deux structures juridiquement différentes mais qui employaient le même personnel. L’AFAA était l’organe d’exécution du service des Œuvres. Philippe Erlanger était directeur à la fois du service des Échanges artistiques et de l’AFAA. Certains fonds d’archives proviennent de ces deux structures. Le fonds d’archives 554INVA qui couvre la tranche chronologique 1922-1973 illustre bien ce partenariat. On y trouve les politiques générales du service (budgets et conseils d’administration de l’AFAA, dossiers de personnels et dossiers généraux) de 1922 à 1971 ainsi que l’activité artistique française à l’étranger dans les domaines du théâtre, de la musique, des arts plastiques et du cinéma pour la période 1931-1973. De 1984 à 1998, l’AFAA absorbe plusieurs organismes : en 1984, l’Association pour le développement des arts et de la culture (ADEAC), en 1997, Intermédia chargée des expositions itinérantes et, en 1998, le CIFACE qui forme les cadres culturels du ministère des Affaires étrangères. Le 1er janvier 2000,  l’association Afrique en créations fusionne avec l’AFAA.


L’Association pour la diffusion de la pensée française (ADPF) est créée en 1946 pour permettre au public étranger d’avoir accès à la production intellectuelle française la plus récente. Elle devint l’opérateur du livre et de l’écrit du ministère des Affaires étrangères.


En 1963, le ministère de la Coopération crée deux nouveaux opérateurs :

  • l’Association universitaire pour le développement, l’éducation et la communication en Afrique et dans le monde (AUDECAM) a pour mission de mener des études et enquêtes, les achats et expéditions de documents et de matériels techniques, la formation du personnel d’enseignement et l’édition de documents pédagogiques.
  • Le Club des lecteurs d’expression française (CLEF) a pour mission de favoriser la diffusion de la production culturelle française et en particulier celle du livre, dans les états francophones partiellement ou entièrement de langue française. 

Ils sont absorbés par l’AFAA en 1999 et fusionnent avec l’ADPF en 2006 pour donner naissance à Culturesfrance. L’Institut français se substitue à l’association Culturesfrance sous la forme d’un EPIC créé par la loi du 27 juillet 2010 relative à l’action extérieure de l’État et par son décret d’application du 30 décembre 2010.


Le Bureau d'enseignement et de liaison pour l'enseignement du français dans le monde (BEL) est créé en 1959 avec pour objectif de parer l’expansion de la langue anglaise. En 1961, la francophonie se diffuse grâce à la création d’une revue « Le français dans le monde ». Cette même année l'Association des universités partiellement ou entièrement de langue française (AUPELF) est créée. En 1969, les professeurs de français à travers le monde se regroupent dans la Fédération internationale des professeurs de français (FIPF). Enfin, il ne faut oublier l’association UniFrance qui agit pour la promotion du cinéma français depuis 1949.

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  • Texte dactylographié

    Contrat signé le 27 juin 1952 entre l'AFAA et la compagnie de théâtre Madeleine Renaud - Jean-Louis Barrault pour une tournée en Amérique du Nord

    554INVA/524

Intégration de la coopération scientifique et technique


De 1956 à 1969, la coopération technique vient s’ajouter aux missions traditionnelles et la direction prend le nom de direction générale des Affaires culturelles et techniques (DGACT). Elle doit s’adapter au processus de décolonisation de la France en Afrique. Les premières actions d’aide au développement se mettent en place. Roger Seydoux, directeur général depuis 1956, décide d’un programme d’expansion qui consolide les positions de la langue et de la culture française et développe la coopération technique dans les nouveaux États indépendants.


C’est en 1969 que la direction générale des Relations culturelles scientifiques et techniques (DGRCST) voit le jour. Les sciences viennent ainsi s’ajouter à la coopération technique et aux échanges culturels. La direction générale reprend les thèmes liés aux énergies, aux questions spatiales, aux sciences de la terre, à l’astronomie, l’agronomie et développement rural et au droit de la mer, missions autrefois dévolues à d’autres directions.


En décembre 1979, à la suite du rapport de Jacques Rigaud sur les relations culturelles extérieures, la réforme proposée est adoptée en conseil des ministres. La DGRCST devient ainsi direction générale des Relations culturelles (DGRC). Un conseil interministériel des relations extérieures sous l’autorité du ministre des Affaires étrangères voit le jour en 1980. L’enseignement et la diffusion du français sont remis à l’ordre du jour et aboutissent à la création d’une direction du français, regroupant l’enseignement scolaire et la politique linguistique.

Le ministère de la Coopération créé en 1959 est rattaché comme secrétariat d’État au ministère des Affaires étrangères en 1981. Les compétences culturelles de l’ancien ministère sont alors transférées à la direction générale des relations culturelles et plus particulièrement à la sous-direction des Identités et Échanges culturels tandis que les moyens concernant directement l’aide à l’ensemble des pays en développement relèvent désormais des services de la Coopération. Les archives de la coopération sont conservées aux Archives nationales pour la période précédant 1983 et aux Archives diplomatiques à compter de cette date.


1988 voit la naissance d’un secrétariat d’État chargé des relations culturelles, internationales et de la francophonie qui révèle une préoccupation politique prépondérante. Deux inventaires émanant du service des Affaires francophones ouverts à la communication témoignent de l’importance accordée à la francophonie : 1375INVA (1969-1980, 160 cartons) et 1956INVA (1981-1986, 317 cartons). Ces fonds présentent un intérêt indéniable pour connaître la situation du français, dans les organisations internationales. En ce qui concerne la politique de francophonie, la langue française est depuis le début du XXe siècle considérée comme une politique d’influence de la France dans le monde. Initiée dès 1926 par la création de l’Association des écrivains de langue française (ADELF), puis développée en 1960 par la naissance de la première institution intergouvernementale francophone, la conférence des ministres de l’éducation et un an plus tard la création de l’association des universités partiellement ou entièrement de langue française (AUPELF), le mouvement prend corps jusqu’à la création en 1970 de l’Agence de coopération culturelle et technique (ACCT), organisation internationale rassemblant les pays ayant la langue française en partage et la volonté de promouvoir la coopération culturelle et technique entre eux. L’ACCT devient en 1998 l'Agence intergouvernementale de la Francophonie et, en 2005, l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF). Le premier Sommet des chefs d'État et de gouvernement des pays ayant le français en partage, communément appelé « Sommet de la Francophonie », a lieu en 1986 à Versailles. Quarante-deux États et gouvernements y participent et retiennent quatre domaines essentiels de coopération multilatérale : le développement, les industries de la culture et de la communication, les industries de la langue ainsi que le développement technologique couplé à la recherche et à l'information scientifique.

Force est de constater que la politique culturelle et linguistique française s’élabore avec l’organisation internationale de la francophonie et s’appuie sur elle pour mettre en place une politique d’influence culturelle et linguistique nécessaire pour contrer l’influence de la langue anglaise et la perte d’influence de l’enseignement du Français. Les séries ayant trait aux organismes de francophonie (Haut Conseil de la francophonie, Haut Comité de la langue française, Comité interministériel pour les affaires francophones) et aux grandes conférences internationales sont certainement les plus représentatives pour comprendre le soutien de la France à l’internationalisation de la promotion de la langue française.


La réforme engagée en 1998 pour « renforcer la cohérence de la coopération internationale et lui donner toute sa place dans l'action extérieure de la France et mieux y associer l'ensemble de la société civile » voit son aboutissement dans la création, en janvier 1999, de la direction générale de la Coopération internationale et du Développement (DGCID). En 1999, lors de la disparition du ministère de la Coopération, ses services sont fondus dans ceux du ministère des Affaires étrangères, dont ceux de la DGCID. Son action est plus particulièrement tournée vers l'aide publique au développement, la recherche scientifique, la formation des élites et le renforcement de la présence française dans le paysage audiovisuel mondial. La chaine de télévision francophone TV5 voit le jour en 1984. Issue de l’alliance de différentes chaines de télévision publiques (TF1, Antenne 2 et FR3 pour la France, la RTBF pour la Communauté française de Belgique et la TSR pour la Suisse) et d’autre consortium étranger francophone, elle prend le nom de TV5 Monde en 2001.

Vers une diplomatie d'influence


En 2009, la Direction des Affaires économiques et financières (DAEF) fusionne avec la DGCID. La direction générale de la Mondialisation, du Développement et des Partenariats (DGM) voit le jour dans le cadre d'un plan de réforme du ministère des Affaires étrangères et européennes, axé sur l'idée que la France doit mieux adapter son réseau diplomatique à la mondialisation. Dans une conférence de presse (25 mars 2009), Bernard Kouchner, à l’origine de cette réforme, explique que « les opportunités et les problèmes liés à la mondialisation demandaient une expertise spécifique, une vision plus cohérente et une capacité d’initiative renouvelée. La direction générale de la Mondialisation, du Développement et des Partenariats [...] est le pilote des stratégies de long terme pour répondre aux enjeux globaux [...] : la santé, la démographie, l’énergie, les ressources naturelles, [...] l’économie, la technologie et la culture ». Elle s’appuie sur une administration dotée de moyens budgétaires et humains conséquents ainsi que d’un réseau d’opérateurs en France et à l’étranger qui reste un des plus important dans le monde : services de coopération et d’action culturelle des ambassades à l’étranger, quatre-vingt-dix-huit instituts et centres culturel qui dépendent de l'Institut français, alliances françaises conventionnées par le ministère des Affaires étrangères (environ huit cents implantations dans cent-trente-sept pays).


Le Quai d’Orsay investit dans une diplomatie d’influence en élargissant son champ d’action à l’environnement, au tourisme, à l’économie mais aussi à l’art de vivre à la française (gastronomie, vins, mode, patrimoine). On se tourne vers un soft power à la française, concept développé dans les années 1990 par Joseph Nye, théoricien américain des relations internationales, qui décrit « la capacité d’un acteur politique (État, firme multinationale, institution internationale, voire réseau de citoyens) d'influencer indirectement le comportement d'un autre acteur ou la définition par cet autre acteur de ses propres intérêts à travers des moyens non coercitifs (structurels, culturels ou idéologiques) ». Résolument d’influence américaine, la notion de soft power repose sur la capacité de séduction de ses idées, de ses savoirs, de sa culture et sur leur articulation avec les autres facteurs de puissance.


La diplomatie française opère un changement de sa politique culturelle et de coopération, un passage à une coopération fondée davantage sur l’échange et non plus seulement sur l’apport unilatéral. Cela s’illustre par exemple par la promotion des valeurs de la France avec l’organisation de la Conférence internationale d’Abu-Dhabi sur le patrimoine en danger, la lutte contre le changement climatique avec la présidence de la Conférence de Paris et l’accord qui s’en suivit (COP21), mais aussi  avec l’envoi de chercheurs français dans les instituts de recherche étrangers, les partenariats avec ces instituts de recherche, les coopérations régionales notamment scientifiques, les accords entre universités.


Face à la mondialisation, à des difficultés structurelles et économiques, la France s’ouvre à de nouveaux modèles économiques de modes de financement pas uniquement étatiques mais ouverts au développement de partenariats et au mécénat. Cependant, on peut remarquer que la partie dévolue à la diplomatie culturelle se trouve amoindrie. Entre 2011 et 2015, les dépenses destinées à la coopération culturelle et à la promotion de la langue française se sont contractées de 13,6 % et les effectifs consacrés à l’action culturelle extérieure ont baissé de 20 %. Plusieurs instituts français ont fermé (Venise, Porto, Graz, Amsterdam, Vienne, etc.), le réseau culturel étant parfois mis en difficulté par les coûts afférents à la préservation des lieux qui abritent les établissements.

Archives : de la collecte à la communication


Les archives de la diplomatie culturelle sont indispensables à la connaissance de l’histoire complexe des relations culturelles, scientifiques et techniques de la France. Elles représentent un volume important, environ neuf kilomètres linéaires. En 2010, trois inventaires étaient communiqués. Les Archives diplomatiques ont œuvré pour le retraitement de ces fonds et pour une mise à disposition progressive des inventaires les plus anciens et les plus complets. La mise en ligne de nouveaux inventaires ne cesse donc de s'accroître. Ils sont de plus en plus nombreux à venir enrichir le cadre de classement informatisé de la rubrique Politique culturelle, scientifique et technique. Pour les service à l'administration centrale, les fonds les plus anciens traitent de la coopération artistique et culturelle (554INVA) et de l’enseignement (238QO et 239QO). On y trouve aussi des archives de la coopération audiovisuelle et particulièrement des aides en faveur de la production et de la diffusion des œuvres télévisuelles et cinématographiques (Plan Images Afrique et Fonds Sud Cinéma). À ce titre, un fonds d’archives a été reclassé grâce à la mise en place d’un partenariat entre l’Université Paris-Sorbonne et les Archives diplomatiques. Enfin, les fonds du service de la coordination géographique, service transversal qui reprend toutes les thématiques des missions de la direction générale ont été traités et ouverts à la communication. Ils couvrent la période 1970-1997 (Europe, Afrique du Nord, Moyen-Orient, Asie et Amérique). Ces fonds sont consultables au centre des Archives diplomatiques de La Courneuve. Pour les services à l'étranger, il faut interroger la rubrique Réseau à l'étranger du cadre de classement informatisé. On y trouve un nombre considérable de fonds d'archives remis par les services et instituts culturels. Ces fonds sont consultables au centre des Archives diplomatiques de Nantes.